Sandrine Caloz dirige le domaine familial Cave Caloz dans le Valais, entièrement certifié en culture biologique. Bien que cette méthode de travail respectueuse de l'environnement présente des défis, cette œnologue ne souhaite pas y renoncer.
Sandrine Caloz, votre domaine viticole s’est engagé dans la viticulture biologique. Quelles sont les principales différences avec la viticulture conventionnelle ?
Dans la viticulture biologique, les herbicides, fongicides et insecticides chimiques de synthèse sont interdits. De plus, nous ne pouvons pas utiliser d'engrais azotés minéraux. Les différences ne concernent pas seulement le travail dans la vigne, mais aussi dans le chai.
Où se situent les différences dans le chai ?
Pour le label Bio Suisse, il existe un cahier des charges très détaillé qui interdit l'utilisation de nombreux produits œnologiques.
Pourquoi avez-vous choisi de vous convertir à l'agriculture biologique ?
Ce sont plutôt des raisons philosophiques. Mon père avait déjà certifié une partie du domaine pour la culture biologique au début des années 2000. Bien sûr, c'est parfois difficile, surtout une année comme celle-ci. Nous avons eu beaucoup de pluie et donc beaucoup de stress lié aux maladies fongiques.
Néanmoins, les aspects positifs prédominent pour vous ?
Fondamentalement, nous avons beaucoup moins de pluie dans le Valais que dans d'autres régions de Suisse. Grâce au climat local, nous obtenons des millésimes satisfaisants tant sur le plan quantitatif que qualitatif, même dans des conditions extrêmes. De plus, notre domaine est fortement mécanisé, et nous pouvons travailler avec des tracteurs sur une grande partie des vignes. Cela nous facilite le travail et réduit les coûts de production. Lorsque je discute avec des collègues d'autres cantons, j'entends souvent parler de l'impact croissant du changement climatique sur la production. Je comprends qu'ils soient inquiets. Pour moi, une réorientation n'est cependant pas d'actualité.
Dans quelle mesure ressentez-vous les effets du changement climatique dans votre exploitation ?
Comme les hivers sont moins froids, les gelées printanières sont plus fréquentes. Et puis, les événements extrêmes s'alternent : en 2022, nous avons eu une sécheresse, en 2024 des pluies record. À cela s'ajoute l'apparition de nouveaux ravageurs, comme le scarabée japonais. Je me demande combien de temps il faudra avant qu'il n'apparaisse chez nous. Heureusement, la recherche en Suisse travaille à trouver des méthodes de lutte biologique contre ce ravageur.
Comment décririez-vous votre philosophie en matière de viticulture ?
Depuis huit ans, nous misons sur une viticulture régénérative, qui améliore la biodiversité et la fertilité du vignoble. En août, nous semons des engrais verts, comme le seigle, le trèfle et la navette choux de Chine. Nous essayons ainsi d’augmenter la biodiversité, de sortir de la monoculture et de maintenir un sol couvert. De plus, nous pouvons ainsi capturer le carbone de l'atmosphère et le stocker dans le sol.
Quels sont les avantages qui en résultent ?
En cas de fortes pluies, les sols non traités aux herbicides s'érodent beaucoup moins. Il est donc avantageux que les sols soient couverts d'herbe. Dans nos vignes, nous avons également constaté le retour de certaines espèces d'oiseaux, notamment celles qui mangent de gros insectes. C'est extrêmement intéressant et précieux. En revanche, les coûts de production en agriculture biologique sont plus élevés - de 20 à 30 % de plus au cours d'une année difficile comme celle-ci.
Vos vins sont-ils donc plus chers que ceux issus de l'agriculture conventionnelle ?
C'est là que réside le problème. Les consommateurs suisses sont peu réceptifs à l'argument selon lequel les vins issus de l'agriculture biologique entraînent des coûts plus élevés. C'est certes un argument de vente, mais nous ne pouvons pas pour autant augmenter les prix de nos vins de 30 %. Nous essayons toujours de maintenir des prix compétitifs par rapport aux domaines voisins. Après tout, nous voulons conserver notre clientèle qui nous est fidèle depuis des années.
Cela semble être un équilibre délicat ?
En fin de compte, c'est aussi une question de calcul. Pour certaines spécialités, nous avons une marge un peu plus élevée, pour les vins d'entrée de gamme un peu moins. De sorte que les personnes disposant d'un budget plus limité puissent également se permettre un Fendant ou un Gamay.
Y a-t-il autre chose que vous souhaiteriez souligner en ce qui concerne la viticulture biologique ?
On a souvent l'impression que les viticulteurs biologiques et conventionnels sont en conflit, ce qui n'est pas le cas. Les consommateurs ont parfois une vision très manichéenne, sans vraiment comprendre les difficultés et l'engagement nécessaires pour produire de manière biologique. En même temps, il existe des viticulteurs qui travaillent avec une grande conscience selon les principes de la production intégrée (PI) et qui pratiquent ainsi une viticulture très sensée. Je trouve que la question du bio ou non est plus complexe qu'il n'y paraît à première vue, et pour moi, il n'y a pas de bien ou de mal.
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